Londres noir

Miriam Perier

Asphalte

  • Conseillé par
    15 novembre 2010

    La Tamise n'est pas un long fleuve tranquille !

    J'aime beaucoup les nouvelles noires, j'ai d'ailleurs sur ce blog chroniquer une série de recueils de la collection « Romans d'une ville » des éditions « Autrement ». Étrangement, aucun de ces livres traitant de villes étrangères n'avait Londres comme cadre. Les éditions « Asphalte », dont la ligne éditoriale est très originale, comblent cette lacune. Ayant vécu trois ans à Londres, je vais tenter de retrouver des lieux ou peut-être des pubs connus!

    Ce recueil est divisé en quatre parties :
    Police & Thieves, I Fought the Law, Gun on the Roof et London Calling.
    Dix-sept nouvelles par le même nombre d'écrivains. Les seuls que je connaisse sont les irlandais Ken Bruen et Patrick McCabe et aussi, mais de loin le gallois John Williams.
    Un Londres des quartiers relativement méconnus du touriste, une ville sombre comme si le célèbre « Smog » étendait encore sa chape de cendres sur la capitale anglaise.
    Deux hommes se croisent par hasard, ils ne se sont pas vus depuis vingt six ans, c'est peut-être le moment de jouer carte sur table! Le Brixton dont nous parle Ken Bruen dans « A bloc » ne donne l'impression de déjà lu de sa part dans « Hackman blues »? Sexe, coke et meurtre au menu, et que cela saute ! Avec Steward Home, ce n'est pas « Home sweet home », mais avec Barry Adamson et « Maida Hill/Maida Hell » c'est vraiment l'enfer et damnation. À mon goût la nouvelle la plus étrange et la plus captivante du recueil. « I Fought the Lawyer », c'est la version londonienne de « L'arroseur arrosé » ou le magicien mystifié ! Un psy amoureux de sa cliente, pourquoi pas? La nouvelle se nomme « Je déteste ses doigts », histoire de main et de musique dans un quartier sinistré de Londres. Un parc même londonien peut être le théâtre d'une histoire sordide comme celle qui se passe à Clissord Park. Un peu de football dans « Trouble is a Lonesome Town » qui se déroule à King Cross gare d'où partent les trains pour le nord de l'Angleterre, et ce jour-là, Newscastle joue dans la capitale anglaise ! À noter, la description des clients d'un restaurant!!!!! Renversant ! La famille obèse, la pute et son mac shooté aussi, mais au crack ! Du football encore dans un texte intitulé « Chelsea 3, Scotland Yard 0 ». J'ai souvenir de plusieurs matchs vus à Stamford Bridge, époque (très) lointaine où ce sport m’intéressait! Mais surprise, uniquement le titre parle de football. « Amour » ne parle pas d'amour, mais de haine, et du déclin industriel d'un pays, des laissés pour compte du monde des petits ouvriers blancs et peu instruits et de leur récupération par les mouvements extrémistes. Un texte très sombre et violent. Enfants livrés à eux-mêmes, magie noire et meurtres rituels.
    Des figures de la pègre aux pauvre types fauchés qui espèrent un gros coup. Des dealers et des putes, quelques flics parfois et pas très honnêtes, quelques irlandais (Ken Bruen est passé par là). Bref tous les marginaux et les paumés d'une grande ville, mais aussi un prêtre, un voleur à la tire qui s'essaye au chantage et qui en revient bredouille. Un enfant solitaire, un fugitif qui attend quoi ? Une femme bien sûr ! Mais, et c'est classique dans ce genre d'histoire, il sera berné par cette dernière. Un pauvre type dans une famille ravagée, des musiciens rêvant de gloire.....Un militant de l'I.R.A. prénommé Emmet qui prépare un assassinat à Londres. Rêve? Réalité? Hier? Aujourd'hui? Demain? Le Londres futuriste était le quartier de Canary Wharf, sera-t-il celui du futur ?
    Mais la figure principale, c'est Londres avec la musique en fond sonore, les musiques, devrais-je dire, c'est la ville crépusculaire de « Sic transit gloria mundi » où même la musique n'adoucit plus les mœurs! Des musiciens, des chanteurs et chanteuses, mais ceux qui galèrent dans des boui-boui infectes pour des cachets de misère.....
    Un avant-propos nommé très à propos « Crimes et establishment » de Cathi Unsworth, une biographie des auteurs et une playlist musicale complètent (fort bien) ce recueil.
    Comme dans tous ces ouvrages, la qualité n'est pas toujours égale, mais c'est la loi du (mauvais) genre.